Chers amis,
Nous
revoilà ! Nous revoilà ici dans cette
célébration, entourés par quelques un
des amis,
qui furent présents dés le début de
nos
activités et nous voilà aussi en compagnie
d'autres qui
nous accompagnent depuis moins longtemps dans cette difficile
tâche d'humanisation d’un monde qui, en direction
opposée à nos aspirations, se
déshumanise de jour
en jour.
Par
ailleurs, à l'attention de certaines personnes
présentes
qui n'ont pas une version adéquate de nos travaux et de nos
idées, nous pensons qu'il est tout à fait
opportun de
développer pour eux certains points qui, bien
qu’excessivement simplifiés, peuvent donner une
image
approximative des événements à
l'origine de ce
courant de pensée et d'actions, qui s'exprima publiquement
et
pour la première fois, dans cet endroit
désolé, il
y a aujourd'hui trente ans.
Durant
les années 60, la barbarie de la deuxième guerre
mondiale
était terminée depuis bien longtemps, et un grand
processus de reconstruction économique et de
réorganisation sociale se produisait dans certains points du
globe… Cependant, les conflits belliqueux continuaient, la
faim
et les inégalités se propageaient sous de vastes
latitudes et la capacité de destruction massive grandissait
sans
limites. Le monde était devenu bipolaire et dans les deux
blocs,
on vantait que l'armement était nécessaire pour
éviter l'agression de l'opposant… Ainsi donc le
globe fut
divisé entre idéologies, qui étaient
en position
d'agir comme instrument de domination, mais qui n'étaient
pas en
condition de comprendre le moment historique dans lequel elles se
trouvaient et encore moins de comprendre le processus vers lequel elles
étaient entraînées. La crise de
civilisation qui
commença à s'exprimer à cette
époque ne fut
cependant pas un phénomène original, mais la
simple
continuation et exacerbation des mêmes facteurs qui avaient
contribués à générer les
monstruosités et les catastrophes mondiales. C'est dans ce
climat de malaise général, dans lequel font
irruption les
phénomènes juvéniles de cette
époque parmi
lesquels on peut compter un petit groupe qui démarra sous
cette
latitude et qui s'étend aujourd’hui dans des
endroits
chaque fois plus éloignés. Ce groupe ne put
s'exprimer
librement parce que déjà, à cette
époque
les dictatures commençaient à se
succéder, et
lorsque l'activité militante de ces membres, les
menèrent
à la nécessité de communiquer leurs
propositions
à des ensembles plus nombreux, alors le conflit
commença
à se déclencher, qui amena jusqu'à la
prison et la
déportation de tant de jeunes dont nous voudrions nous
souvenir
en cet instant : des jeunes courageux du Chili et d'Argentine qui
finirent par développer ce mouvement naissant en exil. Nous
voulons aussi nous souvenir spécialement des premiers
membres
d'Espagne, d'Italie et des Etats-Unis qui accueillirent solidairement
les exilés de cette époque là.
Aujourd'hui,
plusieurs de ces anciens amis sont encore présents encore
unis
par tant d'expériences communes… Un chaleureux
salut
à eux tous.
Mais
continuons avec notre récit, durant les années
70,
l'organisation "La Communauté Pour Le
Développement
Humain" commence à ce constituer. Il s'agit d'un groupe
social
et culturel, qui au fil des ans sera reconnu par les Nations Unies.
C'est à ce moment là que des
paramètres
doctrinaires plus précis sont fixés et que
s'établissent les caractéristiques de ce nouveau
type de
mouvement, qui ne peut déjà plus être
confondu avec
la spontanéité d'autres groupes, qui ont une
saveur de
franche décadence et de
désintégration. C'est
à partir de "la Communauté pour le
Développement
Humain" (cet organisme dont le logo était un triangle
inscrit
dans un cercle) que commence à se développer un
grand
ensemble de clubs culturels, d'organisations sociales de quartier, et
de groupes de base. C'est ainsi que le Mouvement Humaniste se forma
lentement, s'étendant aujourd'hui à travers
différentes expressions, qui vont des campagnes
d'alphabétisation dans les pays des Caraïbes et
d'Afrique,
jusqu'aux actions sanitaire et sociale de médecins et
soignants
qui agissent avec beaucoup de limites, mais dans un très bel
esprit, et cela dans plusieurs points du globe. Ce Mouvement humaniste,
tant diversifié dans ses activités sociales et
culturelles, est aussi à l'origine de partis politiques qui
commencent à se former dès les années
80.
Dès les années 90, le Mouvement arrive
à sa pleine
maturité conceptuelle, se définissant comme
Humanisme
Universaliste ou comme Nouvel Humanisme, se différenciant
nettement des anciens humanismes avec lesquels il ne garde aucune
relation ni organique ni idéologique. Cette
année, il
s’apprête à réaliser une
évaluation
complète de ce qui a été fait depuis
les premiers
pas et prétend définir sa stratégie
pour le
siècle à venir.
Pour
compléter notre exposé, nous dirons que ce qui
définit finalement ce mouvement n'est pas une action
politique
déterminée, ni une action sociale ou une
activité
culturelle, mais un ensemble d'idées et un style de
comportements.
En
simplifiant au maximum les propositions les plus
générales de ce mouvement, nous pourrions dire
que
celui-ci favorise, premièrement, le positionnement de
l'être humain en tant que valeur et préoccupation
centrale, de telle sorte que rien ne soit au-dessus de l'être
humain, ni qu'un autre être humain soit au-dessus d'un autre
;
deuxièmement, il affirme l'égalité de
toutes les
personnes et par conséquent, il travaille pour le
dépassement de l'égalité formelle des
droits
devant la loi, pour avancer vers un monde
d'égalité des
chances pour tous. En troisième lieu, reconnaître
la
diversité personnelle et culturelle et affirmer les
caractéristiques propres de chaque peuple, condamnant toute
discrimination qui se réalise au nom de la
différence
économique, raciale, ethnique et culturel. En
quatrième
lieu, il appuie toute tendance au développement de la
connaissance au-delà des limites imposées
à la
pensée par les préjugés
acceptés comme
vérités absolues ou immuables. En
cinquième lieu,
il affirme la liberté d’idées et de
croyances, et
en dernier lieu il répudie toutes formes de violence, ne
comprenant pas seulement la violence physique comme seul facteur, mais
aussi la violence économique, la violence raciale, la
violence
religieuse, la violence morale et psychologique comme des faits
quotidiens enracinés dans toutes les régions de
la
planète.
Ces
propositions de considérer l'être humain en tant
que
valeur centrale, de favoriser l'égalité des
chances pour
tous, de reconnaître la diversité en s'opposant
à
toute discrimination, de favoriser la liberté de penser et
de
lutter contre toute forme de violence, caractérise notre
pensée et notre action dans ses aspects les plus
généraux. En même temps ces
propositions finissent
par former un style de vie et un mode de relations de la plus haute
valeur morale, pouvant s'exprimer dans la phrase "traite les autres
comme tu veux qu'ils te traitent !"
En
dernier lieu, on peut souligner comme facteur déterminant de
notre comportement la participation dans tous les domaines, dans le but
de faire avancer les propositions citées
précédemment. Participer dans les domaines
culturel,
social et politique avec le maximum d'énergie et de
ténacité dont nous soyons capables, va
au-delà
d'être une recommandation de notre mouvement pour devenir une
nécessité de cette époque critique que
nous
vivons. L'argument selon lequel tout est entre les mains d'un
système infiniment puissant et violent et que le
succès
appartient aux corrompus et aux incapables, au lieu d'être un
motif d'acceptation de notre condition d'êtres
humiliés et
soumis, doit se transformer en un stimulus fondamental pour changer
l'état des choses publiques.
D'autre
part, nous soulignons aussi la dimension du strictement personnel et de
l’interpersonnel, qui bien qu'inscrits dans le contexte
social,
constituent le noyau de notre existence. Les relations personnelles,
aujourd'hui détériorées au maximum,
montrent la
croissance d'une violence aveugle dans laquelle le "toi" et le "nous"
disparaissent et dans laquelle l'individu livré à
la
solitude et à la confusion ne trouve pas d'issue. Nous
devons
réaffirmer dans ce domaine que tout être humain a
le droit
de s'interroger sur le sens de la vie, sur l'amour, sur
l'amitié, sur tout ce qui concerne la poésie et
la
grandeur de l'existence humaine et qu'une stupide et petite culture
matérialiste essaie de dénigrer,
entraînant tout
vers des anti-valeurs et vers la désintégration.
Dans
cette situation que nous avons à vivre, nous reconnaissons
le
triomphe provisoire de la culture de l'anti-humanisme et non
déclarons l'échec de nos idéaux qui
n'ont pu
s'accomplir. Mais les triomphateurs d'aujourd'hui n'ont pas le futur
assuré parce qu'une nouvelle spiritualité
commence
à s'exprimer partout dans le monde : ce n'est pas la
spiritualité de la superstition, ce n'est pas la
spiritualité de l'intolérance, ce n'est pas la
spiritualité du dogme, ce n'est pas la
spiritualité de la
violence religieuse, ce n'est pas la lourde spiritualité des
vieilles tables ni des valeurs obsolètes ; c'est la
spiritualité qui s'est réveillée de
son profond
sommeil, pour nourrir de nouveau les êtres humains dans leurs
meilleures aspirations.
Si
aujourd'hui nous devons déclarer notre échec,
nous devons
aussi annoncer qu'une nouvelle civilisation est en train de
naître, la première civilisation
planétaire de
l'histoire humaine. Et par conséquent, ces crises qui
surgissent
et surgiront encore dans un futur proche, serviront, malgré
leur
infortune, à dépasser cette ultime
étape de la
préhistoire humaine. Et chacun saura s'il décide
ou non
d'accompagner ce changement et chacun comprendra s'il cherche ou non un
renouvellement profond de sa propre vie.
En
cette célébration de notre 30e anniversaire, je
veux
faire parvenir mon souvenir le plus chaleureux à nos
centaines
de milliers d'amis dans le monde en même temps que je salue
fraternellement ceux qui aujourd'hui nous accompagnent ici.
Paix, force et joie à tous.
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